15 ans de Mediapart: Passage à Clermont-Ferrand

L’équipe de Mediapart, lors de l’événement, à Clermont-Ferrand le 7 octobre.

Samedi 7 octobre 2023, Mediapart était de passage à Clermont-Ferrand, une étape de son tour dans quinze villes de France pour célébrer ses quinze ans, fêtés le 16 mars 2023.

Une variété de sujets au cœur de l’actualité

Ce samedi 7 octobre à la Coopérative de Mai de Clermont-Ferrand, une partie de l’équipe de Mediapart a organisé plusieurs discussions autour de la presse, le métier de journaliste et le travail de Mediapart. Au programme, quatre présentations ont eu lieu. D’abord, l’introduction par le co-fondateur de Mediapart, Edwy Plenel. Ensuite, une discussion autour du travail local et national et du lien entre Paris et les autres régions avec Nicolas Cheviron, correspondant de Mediapart et Stéphane Alliès, responsable du pôle édition du journal. La séance s’est poursuivie avec Ellen Salvi du pôle politique et Antton Rouget du pôle enquête de Mediapart autour du travail collectif entre ces deux pôles. Stéphane Alliès et Carine Fouteau, elle aussi journaliste à Mediapart, ont ensuite présenté les attentes de la presse vis-à-vis du gouvernement. L’événement s’est clôturé avec des questions du public et la rencontre des journalistes par la suite.

Un journal ancré dans le territoire français

Créé en 2008, Mediapart vit grâce au financement de ses 215 000 lecteurs comme le rappelle Edwy Plenel lors de son introduction, une façon de montrer le besoin de proximité entre le journal et ses lecteurs. C’est grâce à eux que Mediapart est actuellement le troisième quotidien national français en terme d’abonnés numériques, derrière Le Monde et Le Figaro.

Nicolas Cheviron est correspondant dans la région Auvergne-Rhône Alpes chez Mediapart. Pour lui, la principale difficulté lorsqu’on s’installe dans une nouvelle région, c’est la construction d’un réseau pour collecter des informations. Malgré tout, au fil du temps, son réseau s’est développé. Il s’est attaché à couvrir des problématiques délaissées par les médias nationaux implantés en région parisienne comme la « chasse », ou « l’environnement » selon ses termes.

L’indépendance de la presse, un enjeu clé

Pour Antton Rouget du pôle enquête, il y a un enjeu lié à l’indépendance « capitalistique » et « économique » comme dans tous les médias. La rédaction est-elle cloisonnée par rapport aux actionnaires du journal? Le propriétaire a t-il un droit de regard sur ce qu’écrivent les journalistes? Antton Rouget pousse la réflexion plus loin en expliquant qu’il faut tenir compte des liens entre le journaliste et la source si l’on veut éviter une « dépendance » du premier envers la seconde. Pour sa part, Carine Fouteau se félicite de l’indépendance de Mediapart. Mais selon elle, les aides publiques à la presse « enrichissent les plus riches » aux dépens des journaux récemment créés et des médias indépendants.

Antton Rouget rappelle aussi certaines règles de déontologie pour ne pas être attaqué en diffamation devant la justice. L’enquête doit d’abord être un minimum « sérieuse ». Cela paraît logique mais il est important de le rappeler. Par exemple, le journaliste doit s’appuyer sur diverses sources (personnes, documents…) mais aussi recouper les informations qu’il collecte. Surtout, selon Antton Rouget, le journaliste se doit de « respecter le contradictoire », en contactant la personne mise en cause dans une enquête avant la publication de celle-ci. Cela peut ainsi éviter une éventuelle poursuite en diffamation concernant des propos ou des actes dont l’intéressé n’a jamais été à l’origine.

La faiblesse économique de la presse française

Reprenons le cas des aides publiques à la presse. Selon le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil), en 2008, ces aides représentaient 12,9% du chiffre d’affaire de la presse française contre 16,4% en 2015 et 23,3% en 2021. Le constat est sans appel, le montant de ces aides ne cesse d’augmenter. Pour Stéphane Alliès certains titres seraient même « sous perfusion ». Autrement dit, sans les aides publiques, l’activité de certains titres de presse serait compromise. Le partage des aides pose aussi question. Stéphane Alliès cite notamment Les Échos et Le Parisien qui ont touché ensemble 14 millions d’euros en 2022. Or, cette année-là, selon les chiffres du Ministère de la Culture, 370 titres ont obtenu ces aides. Cela fait un total de 28 millions d’euros. Certains médias peuvent donc se sentir lésés. Stéphane Alliès clôture cette conférence en appelant à répartir les aides publiques à la presse « de façon équitable et avec de la transparence ».

Voilà une conférence riche en informations pour qui s’intéresse au travail journalistique et ses problématiques. L’équipe de Mediapart continue actuellement son tour de France dans les villes suivantes: Villeurbanne — 28 octobre, Toulouse — 18 novembre, Bordeaux — en novembre, Lille — 2 décembre, Bruxelles — 16 décembre.

Sources: Mediapart, Ministère de la Culture, Spiil.

Pierrick Mouëza